Plusieurs personnalités politiques ou de la société civile sont indissociables de l’histoire locale dont le plus emblématique de tous : Jean Jaurès.
Jean Jaurès
Né à Castres le 3 septembre 1859, il est issu d'une famille tarnaise. Son père, Jules Jaurès, appartient à une lignée de fabricants de textile de Dourgne. Sa mère, Adélaïde Barbaza, est originaire de la petite bourgeoisie castraise. Jean a passé toute son enfance et son adolescence à la Fédial, petite maison de campagne située à 3 km de Castres, au milieu du peuple paysan, qui l'a profondément marqué. A la suite d'études primaires et secondaires effectuées dans sa ville natale,
Jean Jaurès monte à Paris pour entrer à l'Ecole Normale supérieure, qu'il quittera en 1881, après l'obtention de l'agrégation de philosophie. La même année, il occupe un poste de professeur au lycée d'Albi et sera nommé maître de conférences à la faculté de Toulouse en 1884. Parallèlement, il collabore au journal La Dépêche. Il se marie en 1886 avec Louise Bois, de cette union naissent Madeleine et Louis.
Naissance de l'homme politique
Son intérêt pour la politique débute en 1881, mais c'est en 1885 que Jean Jaurès est élu député du Tarn, puis en 1890, conseiller municipal de Toulouse, où il occupe les fonctions d'adjoint au maire deux ans plus tard. Durant cette période, il découvre peu à peu le monde ouvrier. Elu sur la liste des "républicains de gouvernement", il s'intéresse tout particulièrement aux problèmes sociaux. Son expérience, sa connaissance des milieux ouvriers et des militants socialistes, ses travaux et ses recherches l'orientent vers le socialisme. Cette évolution s'achève avec la grève des mineurs de Carmaux en 1892.
Le soutien des ouvriers de Carmaux
La Compagnie des mines, dirigée par le baron Reille, et son gendre, le marquis Ludovic de Solages, licencie un de ses ouvriers, Jean-Baptiste Calvignac, leader syndical et maire de Carmaux depuis le 15 mai 1892. Ce geste remet en cause le principe du suffrage universel et les droits de la classe ouvrière à s'exprimer en politique. Dans ses articles de La Dépêche, Jean Jaurès soutient cette grève qui a comme résultat la réintégration de Calvignac et la démission du marquis de Solages. Les mineurs et verriers socialistes de Carmaux font appel à lui, et il devient député de cette circonscription en janvier 1893. Jaurès milite avec ardeur en faveur des verriers de Carmaux, renvoyés par leur patron Rességuier, qui fondent en 1896 la Verrerie Ouvrière d'Albi.
Affaire Dreyfus
L'affaire Dreyfus fait entrer pleinement Jaurès dans l'Histoire. Convaincu par ses amis normaliens et le "J'accuse" de Zola, il s'engage avec passion dans cette affaire, qui met la lumière sur une injustice individuelle, et qui remet en cause le respect de l'humanité. L'arbitraire de grandes institutions bourgeoises, notamment de l'armée, est soupçonné. Ces événements marquants lui font prendre conscience des résistances de la société capitaliste, ainsi que l'inquiétante montée du nationalisme et de l'antisémitisme. La défense de la République en devient son objectif primordial. Cette implication de Jaurès dans l'affaire Dreyfus, ainsi que la création de la Verrerie Ouvrière d'Albi, provoquent sa défaite aux élections de 1898, au profit du Marquis de Solages. Il devient directeur de La Petite République, et y publie les Preuves relatives à l'Affaire Dreyfus.
Parallèlement, il dirige l'Histoire Socialiste de la France Contemporaine, pour laquelle il rédige les volumes consacrés à la Révolution Française (1901-1903). Jaurès et son Parti Socialiste Français s'engage nettement en faveur du bloc des Gauches et du Gouvernement Combes (1902-1905).
Réélu député de Carmaux en 1902, il fonde le quotidien L'Humanité en 1904. Durant les dix dernières années de sa vie, il est obsédé par les menaces contre la paix, notamment pendant les guerres balkaniques en 1912-1913. En 1910, il élabore une proposition de loi consacrée à l'armée nouvelle, dans laquelle il conseille une nouvelle organisation de la Défense Nationale. Il mène une campagne contre la loi des Trois Ans de service militaire, votée en 1913, qui rassemble 150 000 personnes au Pré-Saint-Gervais.
La création du mythe
L'influence de Jaurès se développe par ses articles de presse, ses apparitions publiques, son action locale et à la chambre. Sa personnalité fascine : son éloquence, sa simplicité d'allure, sa chaleur communicative, son intégrité morale, sa présence auprès des ouvriers, encourage le peuple et lui donne espoir.
Son engagement déchaîne également des controverses ; réactionnaires, conservateurs, cléricaux voient en lui une menace contre l'ordre, la propriété, l'Eglise. La violence contre Jaurès, suscitée essentiellement par la presse "nationaliste", aboutit à son assassinat le 31 juillet 1914, au café du Croissant à Paris, par le nationaliste Raoul Villain. La mort brutale de cet apôtre de la paix, a lieu trois jours avant la déclaration de la guerre de l'Allemagne à la France. La dépouille de Jaurès est inhumée au cimetière d'Albi, puis est transférée au Panthéon en 1924.
Le souvenir de Jaurès reste très présent en France et dans le monde. Sa personnalité généreuse, tolérante, passionnément dévouée à l'Humanité a fait de lui un homme politique hors du commun. Castres, Albi, Carmaux, qui ont tout particulièrement concerné la vie de Jaurès, accordent une large place à sa mémoire. Pour plus d'informations vous pouvez visiter ce site.
Jean-Baptiste Calvignac
Né à Carmaux en 1854 et fils de mineur, il entre à la Société des Mines de Carmaux à 19 ans comme ajusteur. Son père était passé de la petite exploitation agricole au travail de la mine ; il devait y périr dans un accident. Marqué par les circonstances de son décès, Jean-Baptiste fait de la sécurité un des thèmes de son militantisme. Entré très tôt en politique, il devient conseiller municipal à l'âge de 30 ans et est élu maire à 38 ans, et le reste jusqu'à l'âge de 75 ans.
Sa vie a été tout entière consacrée à la défense des mineurs et au développement des idées socialistes et laïques. Il meurt en 1934 à l'âge de 80 ans, et reste comme l'une des figures les plus emblématiques de la ville de Carmaux.
Michel Aucouturier
Né en 1863 à Montluçon (département de l'allier), il est embauché par Rességuier, patron de choc de la verrerie Sainte-Clotilde à Carmaux. Ardent syndicaliste et anticlérical, il fonde le syndicat des verriers, préside le comité de grève de 1895, s'engage dans la lutte avec les mineurs, et s'affirme militant du groupe socialiste. Il se montre réticent devant l'appel à Jaurès en 1893, mais en devient bientôt l'un des plus fermes soutiens. Il est élu conseiller municipal sur la liste de Jean-Baptiste Calvignac en 1892 et est l'un des fondateurs de la Verrerie Ouvrière d'Albi.
Il disparaît en 1916. Son épouse, Félicie Denizot, se montre également active militante. Leur fille, Michèle, grandit dans une famille imprégnée des traditions du mouvement ouvrier. On y croise des partisans, des responsables syndicaux, ou bien des avocats, défenseurs des militants, tel Vincent Auriol, que Michèle épouse en 1912.
Famille de Solages
L'origine chevaleresque, la famille de Solages est originaire d'un village situé au nord du Rouergue, près de Labastide-Solages. Gabriel de Solages (1711-?), seigneur de Blaye et de Saint-Benoît, obtient en 1752 la concession des mines de charbon sur ses seigneuries. En 1789, 200 ouvriers y extraient 6.500 tonnes de combustibles. Il crée la verrerie de Blaye.
Pendant la Révolution, père et fils, d'idées libérales, réussissent à maintenir leur activité minière. Petit-fils du chevalier, Gabriel-Hyppolyte de Solages (1772-1843), achète en 1808 le château de Mézens qui, depuis lors, est resté dans la famille. Dans sa nombreuse descendance, la branche aînée (celle des marquis de Carmaux) se consacre à l'exploitation de la houille. Son arrière-petit-fils, Ludovic de Solages, marquis de Solages (1862-1927), chrétien rallié à la République, vivant au château des Verreries, est président des Mines de Carmaux de 1895 à 1927. Son fils, Thibaut de Solages (1889-?), est le dernier président de la société des Mines de Carmaux avant la nationalisation. Il clôture, à la sixième génération, l'oeuvre de ses ascendants, parmi lesquels se détache le créateur des mines, le chevalier de Solages.
Pierre-Jean-Louis Campmas
Né en 1755, il est l'unique garçon d'une famille bourgeoise dont le père Jean-Louis est notaire royal à Carmaux, et la mère, Marie Ursule de Tayrac, fille du juge royal de La Salvetat. La famille, bien implantée à Carmaux, est, dès le milieu du XVIIIe siècle, en conflit avec la famille de Solages au sujet de la concession des mines de charbon. Pierre-Jean-Louis Campmas devient avocat au parlement de Toulouse et exerce dans la région albigeoise jusqu'à la Révolution, sous laquelle il devient administrateur du département et juge de paix du canton de Carmaux. Elu à la Convention dans le camp des républicains radicaux, il vote la mort de Louis XVI. " Ignorer l'histoire de son pays, c'est y vivre une sorte d'exil " (P- J- L. Campmas). Il meurt en 1821.
Augustin Malroux
Fils de mineur, instituteur à Cadix, il est capitaine de l'équipe de rugby du Football-club carmausin. Militant actif, il crée une section socialiste. Il devient maire de Blaye en 1935. A Vichy, le 10 juillet 1940, il est le seul député tarnais des 80 parlementaires à voter contre Pétain. Il est révoqué de la mairie de Blaye en 1941. Après dénonciation, il est arrêté à Paris le 2 mars 1943, avec d'autres militants instituteurs. Après Fresnes, il est déporté en Allemagne, et est évacué sur Bergen-Belsen le 3 février 1945. Il y meurt le 10 avril; alors qu'aux élections municipales du 29 avril, tête de liste SFIO, on l'a élu maire de Carmaux.
Louis "Bouloc" Torcatis
Né en 1904 à Tautavel, dans les Pyrénées-Orientales, Louis Torcatis est instituteur, lorsqu'il entre dans la résistance en 1942. Il doit fuir le Roussillon et se réfugie dans l'Aveyron où il
est nommé chef des Corps francs, il se rapproche de Carmaux en habitant les Farguettes. Le 17 mai 1944, "Bouloc" (son dernier nom de guerre), est mitraillé à Carmaux par des policiers français. Il décède le lendemain à la clinique Sainte-Barbe.
Jean Vareilles
Né en 1914 et fils de paysans protestants, Jean Vareilles devient instituteur. Il occupe divers postes dans le Ségala, puis à Carmaux, où il pratique le rugby. Il est élu au Conseil municipal, qui a choisi Augustin Malroux comme maire ; il occupe de ce fait la fonction de premier magistrat en l'absence de ce dernier, mort en déportation. Elu officiellement maire socialiste en 1947, il le reste jusqu'en 1977. Conseiller général de Carmaux de 1970 à 1982, il préside le District Urbain créé en 1966, et l'association des maires du Tarn. Européen, il conclut en 1958 le jumelage avec la cité allemande de Neckarsulm. Il disparaît en 1993, après avoir rédigé plusieurs études historiques.
Marius Valière
Né en 1890 au sein d’une famille originaire de Bourgnounac, il est élevé à Albi par un grand-père. Il est instituteur à Jouqueviel, puis à Carmaux. Doué de talents multiples, il dessine, peint, grave, écrit en occitan et joue la comédie. Il anime Lo Calelh, une société active dans la vie culturelle carmausine de 1947 à 1964. Son oeuvre littéraire, qui comprend une nouvelle, des comédies, des contes et des adaptations des Fables de La Fontaine, n'a été que partiellement éditée. Il décède en 1969. Le Centre culturel de Carmaux a rappelé la vocation du fondateur de la société culturelle languedocienne, à travers une exposition intitulée "Marius Valière et le Calelh", qui s'est tenue en novembre 1998.
Jules Pendariès
Né à Carmaux en 1862, Jules Pendariès grandit à Cordes, terre d'artistes. Ses dons pour la sculpture se développent très vite, puiqu'il réalise à 14 ans une statue de St-Joseph pour le couvent de Cordes. Aidé par la municipalité, il entre à l'Ecole des Beaux-Arts de Toulouse. Une fois marié, il monte à Paris et fréquente le groupe des "Toulousains", dont Falguières et Mercié. Il fait aussi la connaissance du jeune Albigeois Col, qui peindra le plafond du Théâtre municipal d'Albi. Il expose aux salons parisiens à partir de 1885, et est récompensé dès 1891.
Sa notoriété grandissante lui attire l'estime de Rodin (la statue de Pendariès intitulée "le Répit" fut réalisée 3 ans avant le "Penseur"), Sarah Bernardht, Toulouse-Lautrec ou Montoya,
qui lui rendent visite. Le ministre des Beaux-Arts lui confie la mission de restaurer une quarantaine de statues mythologiques du Parc de St-Cloud, travail qu'il réalise en huit ans pour l'Exposition des Beaux-Arts de 1925.
L'œuvre est considérable : bustes-portraits, mais aussi beaucoup de compositions personnelles dont certaines seront conservées à Albi, Carmaux, Cordes, Gaillac... "La sculpture de J. Pendariès, inspirée souvent par un sentiment de tristesse bien rendu, est des plus honorables" Ch. Portal. Il meurt en 1933. Le Centre Culturel de Carmaux lui a dédié une salle d'exposition, où l'on peut admirer l'une de ses sculptures : "le mineur".
Louis Nègre
Né à Carmaux le 14 août 1902, Louis Nègre est originaire de St-Jean de Marcel. Fils de mineur, ce coiffeur remarqué pour sa voix entre au conservatoire de Toulouse en 1920, puis à celui de Paris en 1926. Un premier prix lui ouvre les portes du Palais Garnier et de l'Opéra Comique. Il y joue les grands rôles du répertoire avant que la maladie ne le fixe en tant que professeur au conservatoire de Toulouse de 1937 à 1953. Dès 1921, il est imprésario et metteur en scène de spectacles dramatiques et lyriques, particulièrement en plein air. D'ailleurs, il monte ceux de la St-Privat à Carmaux jusqu'en 1938. Il disparaît en 1962.
En savoir plus :
Le site des archives de la ville de Carmaux